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IDEL

Vendre sa patientèle lorsque l'on est IDEL

Publié le 25/09/2012

A la fin de sa carrière d'infirmier libéral, il est possible de vendre son cabinet à un successeur. Récapitulatif des points importants du contrat de cession à un confrère.

Rappelons que la dernière convention, signée en juin 2007 , supprime la notion de « seuil d’efficience » pour les infirmiers libéraux, libres depuis de développer, sans se soustraire à des quotas, leur activité comme bon leur semble. En plein essor, un cabinet bien placé et de bonne réputation peut donc être le gage d'un exercice professionnel confortable. S’interroger sur sa valeur lorsqu'il vient le moment de cesser l'activité et ainsi de vendre sa clientèle est légitime. Depuis une dizaine d'années, il est donc reconnu comme licite le fait de vendre sa clientèle si il est conservé en première vue la liberté individuelle fondamentale de chaque patient de choisir son professionnel traitant. Mais comment faire, comment choisir ?

La législation

La clientèle paramédicale n’est qu’une forme de clientèle civile, et si pendant des années, toute forme de cession de clientèle civile était illicite aux yeux de la Loi, l’évolution rapide des jurisprudences, et en particulier par l'arrêt du 7 novembre 2000 (Bull. N° 283) de la 1ère Chambre civile, a fini par faire reconnaître la validité de ces cessions. On peut donc dorénavant acheter ou vendre une clientèle médicale ou paramédicale.

Ceci dit, les juges ont émis certaines conditions à ces cessions :

« Si la cession de clientèle médicale, à l’occasion de la constitution ou de la cession d’un fond libéral d’exercice de la profession, n’est pas illicite, c’est à la condition que soit sauvegardée la liberté de choix du patient »1

Il en découle donc que la cession doit respecter deux points, sous peine d’être illicite :

  • la liberté de choix du patient : il s’agira donc de ne pas transférer, entre l’infirmier cédant et l’infirmier acquéreur, les rendez-vous de façon automatique. Les patients devront être informés du changement d’infirmier et invités à choisir s’ils veulent ou non continuer leurs soins avec le nouvel arrivant ;
  • la création ou la cession d’un fond libéral : les juges ne définissent par réellement ce qu’est ce fond, mais classiquement, cela renvoie à la notion de fonds de commerce, donc au cabinet (comprenant biens mobiliers et immobiliers, droit au bail...) A noter aussi que les juges précisent « constitution » ou « cession », ce qui exclut toute mise en jouissance du cabinet, toute mise en location-gérance.

Le prix d’une clientèle, le calcul

Les us et coutumes de la profession font qu’on calcule le prix d’une clientèle sur la base de la moyenne du chiffre d’affaire des 3 dernières années, moyenne calculée à partir des documents comptables (déclarations fiscales et livres de comptes). Puis, suivant les régions, le type de clientèle, l’ancienneté du cabinet, la concurrence, la demande, la possibilité ou non de reprendre le local, etc., on fixe un prix de vente égal à un pourcentage de cette moyenne (entre 10 et 50 % à l’heure actuelle en 2012).

Le contrat de vente

Le contrat est obligatoire

Il est bien évident qu’il est préférable, avant de vendre ou d’acheter, de prendre conseil auprès de professionnels du Droit (avocats et notaires). Ceux-ci seront les plus à même de vous conseiller sur les termes du contrat, l’évolution de la législation, et les prix en vigueur sur votre région.2

Il existe des contrats « type » de « cession de clientèle » ou de « présentation à clientèle », mais comme pour tous les contrats, ceux-ci doivent être adaptés à chaque situation.

Certains points sont quand même incontournables dans le contrat :

1- Les obligations du cédant

  • présenter son successeur à sa clientèle. Une période de remplacement préalable ou de collaboration pourra être un excellent moyen de faire cette présentation. Le cédant devra aussi remettre son fichier clientèle en totalité à son successeur, prévenir sa clientèle du changement de praticien, en l’engageant à reporter sa confiance sur son successeur, tout en sauvegardant sa liberté de choix ;
  • ne pas concurrencer son successeur après son départ (clause de non concurrence sur un périmètre donné et pendant un temps donné) ;
  • s’engager à remettre le droit au bail à son successeur ainsi que l’ensemble du matériel du cabinet.

Il est aussi souhaitable que le vendeur présente son successeur à son réseau professionnel (médecins, autres infirmiers libéraux, pharmaciens, masseurs-kinésithérapeutes, prestataires de service, réseau de soins...) et fasse paraître une ou deux annonces dans la presse locale pour prévenir de son départ et de sa succession (comme le lui permettent les règles professionnelles).

2- Les obligations de l’acheteur

  • l’acheteur s’engage à verser le prix de la vente prévu par contrat, somme à laquelle pourra être éventuellement ajoutée une indemnité, en contrepartie de l'obligation de non-concurrence souscrite par le vendeur.
  • Faire procéder à l’enregistrement de l’acte de cession auprès des impôts dans un délai d’un mois à compter de la signature.

L’incidence fiscale

  • L’acheteur devra payer les droits d’enregistrement. Ceux–ci seront déductibles en frais professionnels, mais pas la somme investie pour l’achat. De même, s’il emprunte pour acheter cette clientèle, seuls les intérêts d’emprunt seront déductibles en frais professionnels (pas le capital).
  • Le cédant, quant à lui, sera imposé sur la somme encaissée, au titre des plus-values. Mais sous certaines conditions, il peut bénéficier d’exonérations. Les détailler toutes ici serait long et certainement fastidieux pour les lecteurs. Vous trouverez donc toutes les explications dans cet excellent document de l’UNASA (Union Nationale des Associations Agrées).

Comment évaluer la clientèle ?

C’est une question importante. En effet, toutes les clientèles n’ont pas la même valeur.

Alors quelques critères peuvent vous aider à évaluer cette clientèle :

  • la quantité de patients : cela est vérifiable sur le fichier clientèle…à la condition que celui-ci soit tenu à jour bien entendu ;
  • l’âge moyen de la clientèle ;
  • la diversité ou non de pathologies et de soins ;
  • les lieux d’habitation de la clientèle (par exemple, les maisons de retraite et lieux d’hébergement pour personnes âgées changeant actuellement de mode de tarification, beaucoup en viennent à se passer des services des infirmiers libéraux. Donc une clientèle majoritairement domiciliée en maison de retraite n’est pas un gage de pérennité…) ;
  • l’ancienneté de la clientèle et sa fidélité au cabinet ;
  • la réputation du cabinet...

D’autre part, il est bon d’évaluer la « concurrence » potentielle (création ou projet de création de structures de soins à domicile HAD, SSIAD, nouveaux infirmiers libéraux sur le secteur, ancienneté des cabinets infirmiers déjà existants...). Et aussi, bien sûr, vétusté du matériel cédé, travaux éventuellement à prévoir dans le local... Le prix de cession dépendra de ces différents facteurs.

Préparer la transmission de son cabinet

Pour ceux qui prévoient, un jour, de céder leur cabinet, il existe des formations sur la transmission de l’entreprise libérale. Cela entre dans le cadre de la formation professionnelle continue et est déductible en frais professionnel.3

Pour conclure

D’un point de vue purement entrepreneurial, la vente d’une clientèle est la reconnaissance logique de l’entreprise libérale. C’est la reconnaissance d’années de travail à créer et fidéliser une clientèle autour d’un cabinet, grâce à ses compétences professionnelles, son savoir-faire et son savoir-être, à créer et pérenniser une entreprise, comme le ferait n’importe quel autre entrepreneur.

Donc pour conclure, vendre sa clientèle tend à devenir une démarche habituelle dans les régions sur dotées tout en restant un processus répandu dans la profession, car près de 20 % des nouveau IDEL y ont recours4. Il s'agit d'un acte fort de transmission entre professionnels pour la continuation des soins des patients. Le choix du successeur ne devrait se faire qu'après mûre réflexion.

Notes

  1. Cour de Cassation, 1ère chambre civile le 7 novembre 2000, confirmé par arrêt de la Cour de cassation, 1ère chambre civile du 30 juin 2004.
  2. Vous pouvez aussi trouver des renseignements, des conseils, des adresses auprès des Centres Départementaux d’Accès au Droit (CDAD) de votre secteur : ou auprès des services juridiques des syndicats professionnels .
  3. Un organisme proposant ce type de formation. D’autre part, les associations de gestion agréées organisent aussi régulièrement des formations sur ce thème.
  4. « Le métier d’infirmière libérale, Tome 1 », A. Vilbrod, F. Douguet et Al., DRESS, n° 58 – avril 2006.

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Florence BRACCIANO GALLEY Cyril JOANNES Rédacteur Infirmiers.com cyril.joannes@izeos.com


Source : infirmiers.com