Le Conseil national présente cinq scenarii de sortie de crise financière, qui reposent toutes sur une cotisation réglée par l’ensemble des infirmiers. Il déclare compter sur un changement rapide et massif de la perception de l’Ordre par la profession. Mais il rappelle que le décret automatisant les inscriptions des salariés est toujours en attente.
Sommé par le ministère de la santé de présenter une « modélisation financière » sur la base d’une cotisation à 30 euros au lieu des 75 actuels, le Conseil national de l’Ordre des infirmiers a finalement préparé cinq « hypothèses budgétaires », dont deux reprennent la cotisation à 30 euros, mais pour les infirmiers salariés seulement. Dans tous les cas, la cotisation des libéraux est égale ou supérieure à 75 euros. L’hypothèse « basse » d’une cotisation à 30 euros pour les salariés et à 75 euros pour les libéraux entraîne un déficit budgétaire de 7,251 millions d’euros pour le prochain exercice (mai 2011 - avril 2012).
Deux hypothèses entraînent un retour à l’équilibre (30 euros salariés / 170 euros libéraux – 50 euros salariés / 103 euros libéraux), une un déficit « contenu » à 2,147 millions d’euros (50 euros salariés / 75 euros libéraux) et enfin l’hypothèse où les cotisations restent à leur niveau actuel (75 euros pour tout le monde) se conclut par un bilan positif à 4,729 millions d’euros. Les scenarii présentés tiennent compte du remboursement de la dette et s’appuient sur un effort de limitation des dépenses.
Étant données les déclarations antérieures de sa présidente, il est facile d’imaginer que les préférences actuelles du Conseil national vont à l’hypothèse où rien n’est changé. Mais sa décision finale n’interviendra que le 29 mars.
On saura alors s’il est prêt à aller jusqu’au bout de son autonomie financière revendiquée et légitimée par la loi : l’éventuelle cessation de paiement en l’absence de soutien gouvernemental.
Car quelles que soient les hypothèses retenues ou imaginées, leur réalisation dépend de deux facteurs qui sont loin d’être acquis : le soutien gouvernemental et surtout celui de la profession. Sur les 80 000 inscrits, 30 000 n’ont pas réglé leur cotisation.
Même en retenant le chiffre de 400 000 infirmiers en exercice comme le fait le Conseil national (ce qui est assez loin des estimations faites récemment par la DREES, plus proches de 500 000 – voir sur Infirmiers.com : Démographie infirmière : un état des lieux ), ça n’est pas beaucoup ! Or les hypothèses sont toutes basées sur 400 000 infirmiers cotisants.
Le Conseil national met en avant l’opposition « acharnée des syndicats confédérés de salariés », dont le discours est « relayé » par le ministère de la santé, « rejoint par certains parlementaires. » Or la question n’est pas de savoir si la profession est opposée ou indifférente à l’Ordre, voire ignorante de ses missions et des bénéfices attendus de son existence. Elle est de savoir comment retourner son opinion en quelques semaines, ainsi que celle du gouvernement.
Pour celle-ci, le Conseil compte manifestement sur le bilan de son action : dans le dossier d’appui à ses hypothèses, il présente une liste impressionnante de ses réalisations au cours de ses deux premières années d’existence. Bien que le Conseil national semble croire à « un changement de perception de l’Ordre par les infirmiers » autorisant une « augmentation rapide et massive des inscriptions au tableau, accompagnée du paiement effectif des cotisations », il paraît assez évident qu’elles ne suffiront pas à convaincre les professionnels, qui ont manifestement du mal à percevoir les bénéfices de l’Ordre au jour le jour. La question de savoir s’ils ont « raison ou tort » est un autre problème.
La conclusion s’impose d’elle-même : s’il n’est pas possible d’obtenir rapidement le soutien des professionnels, le Conseil pense qu’il est jouable de compter sur celui du gouvernement en faisant valoir d’une part son bilan, d’autre part la loi qui donne ses missions à l’Ordre et que l’État est en charge de faire respecter. Quel pourrait être ce soutien ? Une avance de fonds ? le ministère l’a fermement exclue. Une invitation officielle à la profession de cotiser ? il est douteux que cela suffise. Alors ? alors une petite phrase indique clairement la solution : « la légitimité » de l’Ordre doit être « confirmée par les deux décrets d’application que le législateur a prévus : le code de déontologie (…), le décret permettant d’automatiser l’inscription des salariés au tableau. » Si ce décret comporte également l’automatisation du recouvrement des cotisations, le problème est réglé. Sur le papier. Dans la réalité, il risquerait évidemment d’en aller tout autrement.
Les documents du dossier de presse du Conseil national de l’Ordre (16 mars 2011)
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