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DOCUMENTATION

Humeur - Le miel et les abeilles...

Publié le 06/07/2011

La publication du dernier arrêté fixant le quota d’entrée en formation infirmière à 30 846 places pour la rentrée 20111 a donné lieu à un communiqué de presse2 pour le moins étrange de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) le 28 juin dernier.

Raccourcis faciles ou provocation, la lecture de ce communiqué laisse perplexe. Ainsi, il serait possible, en toute simplicité, de résorber une partie du chômage des jeunes en leur offrant une formation infirmière facilitée, sans cette sélection jugée trop sévère, avec une durée moins longue, une formation abandonnant le principe de l’alternance au profit de l’apprentissage, et bien entendu cela résoudrait les difficultés de recrutement dans les établissements privés de santé. Mille excuses si je résume ainsi ce communiqué, mais la caricature d’une caricature reste une caricature.

Un quota ?

La définition de ce quota est le fruit d’un équilibre délicat. On ne peut pas former plus d’étudiants que l’appareil de formation ne le permet. Et n’en déplaise à qui que ce soit, la formation infirmière depuis 1992 - et plus encore avec le programme de 2009 - se fait pour moitié dans les établissements de santé. Il n’est donc pas raisonnable de se plaindre, d’une part d’un manque de personnels et, dans le même temps, de vouloir confier à des personnels en sous-effectif plus d’étudiants à encadrer et former. Former plus reviendrait à moins bien former.

Ainsi, s’il s’agit de garnir les services avec de la main d’œuvre non qualifiée pour faire le chameau coureur, porter tubes et prélèvements au labo, emmener les patients en radiologie, ranger la salle de soins ou la réserve, trier les classeurs et autres paperasseries, alors oui, ouvrons en grand les vannes de la formation infirmière, résorbons le chômage des jeunes, alimentons les services de ce flot d’étudiants « à tout faire », tout sauf des professionnels infirmiers qualifiés.

Les difficultés de recrutement sont fortes. Est-ce une raison pour brader les formations de ces professionnels ? A t-on entendu quelqu’un proposer de modifier la formation médicale en raison de la pénurie médicale ? A t-on entendu quelqu’un proposer de supprimer le numerus clausus, de réduire le temps de formation médicale ? Non. Par contre, on voit ici et là des efforts des collectivités ou des établissements pour séduire le professionnel manquant. Si vous voulez attirer des infirmiers à vous, ouvrez le pot de miel et surtout mettez du miel dedans. Ces infirmiers dignement reconnus, rémunérés et valorisés, vous aideront ensuite à fabriquer votre miel, telles de bonnes abeilles. N’oublions pas que ce sont les étudiants eux-mêmes, lors de leurs stages, qui font et défont la réputation des établissements et des services.

Un étudiant qui sera bien accueilli en stage, qui sera considéré et respecté, qui bénéficiera d’un encadrement formateur, qui pourra apprendre et comprendre son métier infirmier, aura certainement envie de revenir travailler là une fois diplômé. Cet étudiant vous aidera à attirer vers votre pot de miel d’autres étudiants, d’autres futurs diplômés. C’est ainsi que les beaux essaims se constituent. L’étudiant infirmier, l’infirmier diplômé et l’abeille ont en commun la faculté de voler de site en site à la recherche des meilleurs supports, du meilleur pollen, de la meilleure ruche ou du meilleur service. Le butinage des abeilles se traduit par le turn over des infirmiers.

Des mouches qui feraient du miel ?

Sans vouloir offenser la communauté des mouches, les abeilles ont une qualification particulière, adaptée à leur mission de faire du miel. Vouloir réduire le niveau de formation des infirmières, c’est comme demander à des mouches de faire du miel. Ça ne marchera pas. Il est étrange que la Fédération de l’hospitalisation privée veuille une réforme de la formation des personnels paramédicaux infirmiers tirée vers le bas, alors que cette formation vient d’être tirée vers le haut avec la mise en place du programme de 2009. Que cet article soit une invitation au débat et à la précision des idées perçus dans ce communiqué de presse.

Notes

  1. Arrêté du 1er juin 2011 fixant le nombre d’étudiants à admettre en première année d’études préparatoires au diplôme d’Etat d’infirmier, JORF n°0143 du 22 juin 2011
  2. http://www.fhp.fr


Jérôme CLÉMENT
Responsable formation IZEOS
jerome.clement@infirmiers.com


Source : infirmiers.com