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Hôpital Saint-Jean-de-Dieu : bras de fer entre les salariés et la direction

Publié le 10/07/2017
gant de boxe lutte sociale

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Les salariés de l’hôpital Saint-Jean-de-Dieu, à Lyon, sont en colère. Suite à l’annonce, par la direction, d’une série de mesures, parmi lesquelles sont envisagées une réduction des effectifs, une réduction du nombre de lits et même de certains services ainsi qu’une éventuelle sous-traitance des Agents de Service Hospitalier, le personnel menace de se mettre en grève illimitée à l’appel d’une intersyndicale SUD-CFTC-CGT–CFDT. Du côté de la direction de l’établissement, on entend l'inquiétude des salariés, mais on assure faire avec les contraintes financières

Le personnel de l’hôpital a décidé de se mobiliser "afin d’exiger de sa direction les moyens de remplir ses missions et d’exercer dans de bonnes conditions", espérant ainsi "faire reculer la direction".

La direction de l’établissement Saint Jean de Dieu, un Centre Hospitalier privé à but non lucratif et assurant les missions de service public de psychiatrie de secteur situé à Lyon, vient d’annoncer aux salariés une série de mesures visant à réduire les effectifs dans les unités, à fermer des lits et /ou des services en intra comme en extra hospitalier, à une possible sous-traitance des Agents de Service Hospitaliers et à une réorganisation des services supports : blanchisserie, logistique...  afin de répondre à une baisse de dotation de l’Agence Régionale de Santé évaluée à 2.5 millions d’euros, selon le communiqué transmis par Linda Benmouma, infirmière au sein de l’établissement et déléguée syndicale. Agnès Marie-Egyptienne, directrice générale de la Fondation Action Recherche Handicap et Santé Mentale (ARHM) et directrice du Centre Hospitalier Saint Jean de Dieu, jointe par téléphone, confirme mais préfère parler de pistes de réflexion pour une partie de ces mesures, ainsi que d'un certain nombre d'actions qui vont se concrétiser dans l'année.

Dans le détail il va s'agir, en 2017, de la fermeture d'une unité d'hospitalisation séquentielle pour enfants et de l'évolution de plusieurs unités de soin en un Centre d'activité thérapeutique à temps partiel (CATTP) petite enfance. Quant à la diminution des effectifs, elle doit aussi démarrer au cours de l'année. Selon la directrice de l'établissement, un peu moins de dix postes d'infirmiers sont concernés, mais les professionnels seront redéployés au sein de l'hôpital. Pour le reste des points, tout est encore à l'étude assure Agnès Marie-Egyptienne. La sous-traitance des ASH n'est pas encore actée, comme est encore à l'étude la perspective de diminution de capacités voire d'unités mais avec l'objectif de développer d'autres dispositifs de soin (du type : alternatives à l'hospitalisation. Suite à cette annonce, le personnel de l’hôpital a décidé de se mobiliser afin d’exiger de sa direction les moyens de remplir ses missions et d’exercer dans de bonnes conditions, espérant ainsi faire reculer la direction.

Ce qui importe à la direction, c’est de faire des économies pendant que, nous, soignants, travaillons en totale insécurité et que la qualité des soins ne cesse de se dégrader au fil des années.

Le personnel craint une dégradation des conditions de travail...

Le personnel craint surtout pour ses conditions de travail. Ce qui importe à la direction, c’est de faire des économies pendant que, nous, soignants, travaillons en totale insécurité et que la qualité des soins ne cesse de se dégrader au fil des années, déplore Linda Benmouma. Sur l’éventualité de la fermeture de lits notamment, les conséquences inquiètent : cela entraînera des durées d’hospitalisation plus courtes, donc une consolidation des soins mal assurée et nous amènera à accueillir des patients encore plus en souffrance, redoute Linda Benmouma. La baisse des effectifs infirmiers et la sous-traitance étendue aux ASH dans les services accueillant la crise aura aussi un impact sur la sécurité de tous (soignants et patients), regrette l’infirmière. La sous traitance des ASH n’est pas envisageable, nous avons besoin de nos ASH qui connaissent les patients et leur famille. Ils participent à offrir une prestation de qualité et ont une place entière dans le soin, sont intégrés aux équipes soignantes.

...mais la direction avance la nécessité d'une nouvelle organisation

Aujourd'hui, on est dans une réflexion sur l'évolution de l'organisation du centre hospitalier Saint Jean de Dieu, qui prend en compte deux paramètres, détaille la directrice de l'établissement : l'orientation sur la politique de santé (et notamment dans le domaine de la psychiatrie), qui vise désormais à soigner les patients au plus près de leur lieu de vie. C'est déjà majoritairement le cas en psychiatrie, du fait du secteur, mais s'agissant du Centre hospitalier, on a une activité d'hospitalisation complète, qui, même si elle commence à diminuer, reste importante. Il nous faut donc interroger notre réorganisation de façon à renforcer l'ambulatoire. Le deuxième paramètre que nous nous devons de prendre en compte, est économique et financier. Depuis ces dernières années, les budgets d'Assurance Maladie sont à la baisse alors que nos charges ont tendance à augmenter. De plus, l'ARS a mis en place pour 2017 une péréquation des dotations annuelles de financement des hôpitaux psychiatriques à partir d'indicateurs montrant que le Centre Hospitalier Saint Jean de Dieu est surdoté. Dans ces conditions, il importe de faire converger notre organisation avec un budget qui va significativement diminuer dans les années à venir. 

Les salariés, pour l'heure, ont déposé un préavis de grève. Le moment fort devrait se tenir mardi 11 juillet. La direction recevra ce jour-là une délégation, à la demande des syndicats, pour échanger sur leurs revendications.

Comment, dans ce contexte, assurer nos missions ?

Ces restructurations annoncées mettent en péril les soins, que nous essayions de maintenir tant bien que mal, jour après jour à un niveau de qualité malgré le fait qu’on nous en demande toujours plus avec toujours moins, nous avons déjà réalisées de nombreuses concessions, détaille le communiqué. Nous n’arrivons plus à répondre aux besoins de la population, à assurer nos missions essentielles de service public et à garantir l’accès aux soins à tous, sinon au prix de notre propre santé. D’après les salariés, la direction mènerait donc une politique orientée principalement par des contraintes économiques et dénouée de tous sens clinique, provoquant une véritable crise identitaire chez les soignants et affectant les valeurs au sein du corps soignantsDes cadres intermédiaires annoncent à leurs équipes que leurs unités vont peut-être fermer, et les laissent dans une totale incertitude, ce qui crée de l’insécurité et engendre un mal être et une souffrance importante, souligne Linda Benmouma qui interroge : Comment soutenir une idéologie humaniste du soin face à de tel bouleversements, comment peut-on fédérer les personnels à investir et à porter le projet d’établissement sans la participation et l’adhésion de tous ?

Pour les salariés enfin, l’argument des restrictions budgétaires avancé par la direction n’est pas si recevable. Linda Benmouma en est convaincue : L’hôpital a bien de l’argent mais ne l’utilise pas pour le maintien des emplois et des structures. De son côté, la direction assure qu'elle entend l'inquiétude, mais maintient que la diminution des moyens contraint à penser une nouvelle organisation. Notre objectif, c'est que cette réflexion implique et s'appuie sur les professionnels. Sur la question de la qualité des soins, Agnès Marie-Egyptienne réaffirme qu'il s'agit bien d'un objectif porté par l'ensemble de l'établissement auquel elle sera particulièrement attentive, tout comme aux conditions de travail des salariés. 

Les salariés, pour l'heure, ont déposé un préavis de grève. Le moment fort devrait se tenir mardi 11 juillet. La direction recevra ce jour-là une délégation, à la demande des syndicats, pour échanger sur leurs revendications. 

Susie BOURQUINJournaliste susie.bourquin@gmail.com @SusieBourquin


Source : infirmiers.com