Ils rassemblaient personnels de l'hôpital, médecins, élus, représentants syndicaux, universitaires et usagers pour protester contre le projet de l'ARS de supprimer une des quatre autorisations de chirurgie cardiaque de l'AP-HP.
Environ 400 manifestants selon la préfecture du Val-de-Marne et 600 selon les syndicats se sont rassemblés le 10 février 2011 midi devant l'entrée de l'hôpital Henri Mondor (AP-HP) à Créteil pour demander le maintien du service de chirurgie cardiaque.
Les manifestants ont également bloqué la route nationale 19, située à 50 mètres de l'hôpital, pendant environ une demi-heure, ont indiqué à l'APM le secrétaire SUD de l'hôpital, Jean-Marc Devauchelle, et le secrétaire CGT, Christophe Pin. Ils se sont tous les deux déclarés satisfaits de la mobilisation générée par ce premier appel à la manifestation.
Le mouvement rassemblait à la fois des personnels, notamment des médecins, des élus, des syndicats et des usagers contre le projet de fermeture de la chirurgie cardiaque de l'hôpital Henri Mondor, dans le cadre de la volonté de l'Agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France de supprimer une des quatre autorisations de chirurgie cardiaque de l'AP-HP.
Une assemblée générale est prévue mardi et une nouvelle manifestation vers la préfecture du Val-de-Marne le mardi 22 février. Parallèlement, une pétition a déjà rassemblé plus de 1.000 signatures, a précisé Jean-Marc Devauchelle. La Coordination pour la défense du service de chirurgie cardiaque de l'hôpital Henri Mondor va demander à rencontrer le directeur général de l'ARS, Claude Evin, et le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, Xavier Bertrand.
Pour le moment, "rien n'est fait (...) nous sommes certes dans un bras de fer" avec l'ARS mais cela ne finira pas forcément comme le prévoit Claude Evin, a souligné le responsable de la coordination, Fabien Cohen, en rappelant les projets finalement annulés dans les hôpitaux parisiens de Tenon et de Trousseau. Il est intervenu lors d'une conférence de presse organisée avant le rassemblement et au cours de laquelle se sont exprimés à tour de rôle une douzaine d'élus locaux et de représentants des médecins, des syndicats, de l'université et de la Faculté de médecine.
La présidente de l'Université Paris Est Créteil Val-de-Marne, Simone Bonnafous, a observé qu'il n'y avait eu "aucune notification réelle" de la fermeture du service pour le moment. "Nous pensons qu'il y a toujours une marge de manoeuvre" et que le gouvernement teste la force de résistance au projet, a-t-elle ajouté. Sans se déclarer opposés à une coopération avec l'hôpital parisien de La Pitié-Salpêtrière, plusieurs intervenants ont insisté sur le fait qu'aucun groupe de travail n'avait commencé à travailler sur la suppression de l'autorisation de chirurgie cardiaque d'Henri Mondor et qu'il était irréaliste de vouloir organiser le transfert à La Pitié-Salpêtrière d'ici juin. Ils ont appelé à discuter sereinement de la situation, "sans précipitation".
Une activité en hausse, des projets et un excédent
Le Pr Jean-Paul Couetil, qui est responsable de la chirurgie cardiaque d'Henri Mondor depuis six mois, s'est également associé à la colère et à l'indignation suscitées par le projet de fermeture. Le service s'est réorganisé et a augmenté son activité de 30% sur les six derniers mois.
L'hôpital prévoit cette année de multiplier par deux ou par trois son activité de transplantation cardiaque et pourrait également devenir un centre de référence pour la chirurgie valvulaire, son excellence dans cette discipline étant reconnue au niveau européen.
Le Pr Jean-Paul Couetil a observé que supprimer le service de chirurgie correspondrait à "amputer" le pôle cardiovasculaire. Ce pôle est pourtant le plus gros pôle public dans cette discipline en Ile-de-France avec 110 lits de médecine et une quarantaine de chirurgie et est d'ailleurs souvent pris comme exemple d'efficience, a remarqué le Pr Emmanuel Teiger, responsable de la cardiologie interventionnelle.
Le député-maire PS de Créteil, Laurent Cathala, a observé que le pôle cardiovasculaire dégageait 3,6 millions d'euros d'excédents qui contribuaient à l'équilibre de l'hôpital Henri Mondor.
De plus, "le groupe hospitalier [Henri Mondor-Albert Chenevier] est le premier en termes d'équilibre budgétaire au niveau de l'AP-HP, les recettes du pôle cardiovasculaire représentent 20% des recettes de l'établissement Henri Mondor et c'est une activité bénéficiaire", a expliqué la présidente du comité consultatif médical (CCM) du groupe hospitalier, Ariane Mallat. En cas d'arrêt de la chirurgie cardiaque, "les pertes qui vont être engendrées (...) vont être extrêmement importantes" car cela impliquera "la disparition d'un certain nombre d'activités de cardiologie interventionnelle" assujetties à la présence d'un service ayant une autorisation de chirurgie cardiaque, a-t-elle ajouté.
Le Pr Emmanuel Teiger, responsable de la chirurgie interventionnelle, a précisé que l'autorisation de chirurgie cardiaque du service avait été attribuée en janvier 2010 pour cinq ans. Il a observé que le schéma régional d'organisation sanitaire (Sros), dont le volet cardiologie a été adopté mi-2010, prévoyait qu'une autorisation pouvait être dénoncée deux ans après l'adoption du volet, soit d'ici juin 2012, mais que cela n'avait pas de fondement juridique.
Pour lui, il n'existe aucun critère objectif pour transférer la chirurgie cardiaque à La Pitié-Salpêtrière. Cela se fonde simplement sur la volonté de fermer un centre de l'AP-HP, "on est dans le degré zéro de la planification sanitaire".
Le Val-de-Marne, avec 1,5 million d'habitants, dispose d'un seul CHU avec une bonne activité cardiovasculaire, qui couvre aussi le Sud Seine-et-Marne, alors qu'avec 2 millions d'habitants, Paris intra-muros dispose de cinq centres qui font de la chirurgie cardiaque, dont trois à l'AP-HP et deux dans le privé, a renchéri Jean-Pierre Becquemin, responsable de la chirurgie vasculaire et endocrinienne. Il a regretté que l'activité d'Henri Mondor doive être transférée à La Pitié-Salpêtrière uniquement pour corriger les investissements "pharaoniques" réalisés dans cet hôpital, où des bâtiments neufs ont été construits pour le cardiovasculaire et la neurochirurgie mais sont actuellement "vides".
Le doyen de la faculté de médecine de Créteil, Jean-Luc Dubois-Rande, et la présidente de l'Université Paris Est Créteil Val-de-Marne ont fait part de plusieurs projets de collaboration hospitalo-universitaire impliquant le pôle cardiologie de l'hôpital et qui seraient affaiblis par un arrêt de la chirurgie cardiaque.
Pas de remise en cause de la cardiologie interventionnelle, pour l'ARS
Dans un communiqué (10 février 2011), l'ARS Ile-de-France a précisé que "l'arrêt de la chirurgie cardiaque au sein de l'hôpital Henri Mondor ne remet absolument pas en cause le maintien sur ce site d'une importante activité de cardiologie interventionnelle (rythmologie, angioplastie)". Elle explique que son choix de réorganiser la chirurgie cardiaque est lié aux difficultés de recrutement des chirurgiens qui vont s'aggraver et à l'évolution des technologies et des modalités de prise en charge, "qui va induire dans les prochaines années une diminution progressive et certaine du recours à la chirurgie cardiaque".
Par ailleurs, "la chirurgie cardiaque est une activité programmée, très lourde qui nécessite des plateaux techniques de haute technicité déployant une activité régulière et importante" et "il ne s'agit pas d'un service public médical de proximité". "La question de l'accessibilité géographique (...) ne se pose donc pas dans une région où l'offre de soins dans ce domaine reste très importante (10 sites autorisés) et où d'autres services seront accessibles à quelques kilomètres de distance", explique l'ARS.
Enfin, l'ARS observe que le Sros a été "longuement concerté" avec l'ensemble des acteurs et des communautés professionnelles concernés "dès le début 2009" puis il a été "discuté et voté dans le cadre des conférences sanitaires de territoire au printemps 2010", avant d'être publié le 27 juin 2010 après avis du comité régional de l'organisation des soins.
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