Asalée est un dispositif expérimental de coopération entre médecins généralistes et infirmiers* libéraux. Une analyse quantitative a dégagé trois types de binômes professionnels. Elle permet de cerner quelques conditions pour des coopérations réussies, qui selon les auteurs, pourraient être étendues à celles impliquant des infirmiers de pratique avancée (IPA).
Créé en 2004, le dispositif Asalée (Action de santé libérale en équipe) est un dispositif expérimental de coopération entre médecins généralistes et infirmiers. Il bénéficie de financements spécifiques de la part du ministère de la Santé et de l’Assurance maladie, dans le but d’améliorer la prise en charge de patients souffrant de certaines pathologies chroniques (diabète de type 2, bronchopneumopathie chronique obstructive, risque cardiovasculaire élevé, troubles cognitifs) et d’épargner du temps aux médecins .
Il repose sur une offre d’éducation thérapeutique (ETP) et la délégation dérogatoire d’actes médicaux vers les infirmiers notamment l’électrocardiogramme, la spirométrie, la prescription d’examens biologiques, l’examen du pied diabétique, ou encore les tests de mémoire. Ses effectifs s’élevaient en 2015 à près de 3 000 médecins et plus de 700 infirmiers, répartis en 1065 binômes sur l’ensemble de la métropole.
Une équipe IRDES (Institut de recherche et documentation en économie de la santé) - INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) en a effectué une analyse quantitative exploratoire à partir d’une enquête menée mi-2015. Celle-ci avait, en effet, bénéficié d’un fort taux de participation : 66% des binômes dont 75% des médecins et 87% des infirmiers. Ces travaux ont abouti à une typologie des binômes en 3 classes.
Dans la classe 2, les professionnels mettent en avant le développement d’une relation privilégiée avec le patient, une collaboration étroite avec le médecin ainsi que le développement de compétences faisant partie du rôle propre infirmier
Une étude a pointé trois types de coopérations distincts avec des résultats bien différents
La classe 1 (38% des effectifs) est constituée de binômes ayant une grande ancienneté (souvent antérieure à 2010) et une activité Asalée intense, avec des infirmiers en grande majorité salariés et à plein temps, axées sur l’ETP et les actes dérogatoires, exerçant dans un seul cabinet, qui est le plus souvent situé dans un groupe pluriprofessionnel et implanté dans des territoires défavorisés. Elles bénéficient d’un soutien logistique important (bureau dédié, secrétariat). Médecins et infirmiers sont le plus souvent très satisfaits du dispositif (73%), les médecins parce qu’il améliore leurs conditions de travail (78%) et la prise en charge de leurs patients (51%), les infirmiers parce qu’il leur permet de privilégier la relation avec leurs patients et d’enrichir leur pratique. Tous s’accordent sur la fréquence élevée de leurs échanges formels et informels avant et/ou après la rencontre avec le patient.
La classe 2 (44% des effectifs) comporte des binômes plus récents et moins actifs exerçant dans des cabinets de groupe mono ou pluridisciplinaires et volontiers situés dans des territoires favorisés. Les infirmiers sont plus souvent salariés, mais en temps partiel, et travaillent plus volontiers dans plusieurs cabinets avec plusieurs médecins. Ici aussi est relevée la fréquence élevée des échanges. Les infirmiers passent plus de temps à la gestion des dossiers patients, à la formation et aux actions de développement que celles de la classe 1. Ils mettent en avant le développement d’une relation privilégiée avec le patient, une collaboration étroite avec le médecin ainsi que le développement de compétences faisant partie du rôle propre infirmier, mais non reconnues dans la nomenclature des actes de la profession.
La classe 3 (18% des effectifs) est celle des binômes en construction, dont l’activité Asalée est plus faible, avec des infirmiers à temps partiel (14 heures par semaine) de statut plus fréquemment libéral et avec un temps de travail moins orienté sur l’ETP et les actes dérogatoires. Ils exercent dans des cabinets pluriprofessionnels de taille petite ou moyenne, installés dans des territoires relativement défavorisés. Les médecins y sont peu investis et travaillent avec plusieurs infirmiers, qui eux-mêmes collaborent avec plusieurs médecins. Les infirmiers ont les mêmes motivations que ceux de la classe 2, mais s’accordent avec les médecins sur la modestie des effets du dispositif. De plus, ils considèrent leurs activités d’ETP comme difficiles à mettre en œuvre.
Pour les auteurs, c’est la différence de perception des apports du dispositif entre les classes 2 et 3 qui est la plus instructive. Elle tient à plusieurs éléments : dans la classe 2, la délégation des tâches et l’ETP ont été mis en œuvre plus rapidement. De même, plus de patients ont été inclus dans des protocoles, les médecins travaillent avec un seul infirmier (contre plusieurs dans la classe 3) et les infirmiers, pour la plupart salariés (libéraux dans la classe 3), disposent d’un appui logistique plus fort comme un bureau dédié et l’implication du secrétariat.
Selon les auteurs, ces conclusions devraient faire réfléchir aux conditions de développement des coopérations entre médecins généralistes et infirmiers, notamment ceux qui vont exercer en pratique avancée.
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Référence
Anissa Afrite, Carine Franc, Julien Mousquès. Des organisations et des pratiques coopératives diverses entre médecins généralistes et infirmières dans le dispositif Asalée : une typologie des binômes. IRDES. Questions d’économie de la santé n°239, février 2019
Serge CannasseJournaliste serge.cannasse@mac.com
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